Wanze raffinera de la canne

Photo ©Unclesam

Il y a de cela quelques semaines, la sucrerie de Wanze recevait de la part de la Région wallonne l’autorisation de produire du sucre de canne en ses murs. Si cette nouvelle a pu faire froncer des sourcils les betteraviers, la Raffinerie Tirlemontoise (RT), membre du groupe allemand Südzucker, assure que la canne n’entamera en rien la priorité que représente la betterave au sein du groupe. La Confédération des Betteraviers Belges (CBB), quant à elle, se veut également rassurante à ce sujet : investir à Wanze n’est pas nécessairement une mauvaise chose.

Anne-Laure Michiels

Avec la fin des quotas betteraviers à la sortie de la campagne 2016-2017 est aussi arrivée la fin de l’autosuffisance certaine en quantité de sucre. « Si l’on sème moins de betteraves et que le rendement est moindre, nous sommes directement en situation de pénurie » avance Vincent Demanet, membre du Bureau de la CBB. Dans ce contexte, raffiner du sucre de canne à Wanze fait donc sens pour la RT et le groupe Südzucker, qui par ailleurs embraie le pas à d’autres groupes ayant déjà lancé leurs propres activités de raffinage de sucre de canne.

Variable d’ajustement

La production de sucre de canne à Wanze constituera pour le groupe sucrier allemand une variable d’ajustement pour honorer les contrats envers ses acheteurs, au cas où le rendement betteravier se verrait diminué, relaie Vincent Demanet.

Sucre de canne

Une explication corroborée par Guy Paternoster, Chief Executive Officer (CEO) de la RT : « Le rendement betteravier peut varier entre +10 et -10% d’une campagne à l’autre. L’objectif poursuivi par Südzucker en investissant dans la chaîne de raffinage de sucre de canne à Wanze est de pouvoir disposer d’une plus grande flexibilité quant à ces écarts de production et d’apporter une réponse aux clients qui ont besoin de leur quantité de sucre. Cependant, notre priorité est et restera la betterave. » Cette dernière affirmation, Vincent Demanet et la CBB en ont également reçu l’assurance et l’engagement de la part du groupe sucrier germanique.

L’entrée du sucre de canne en Europe n’est pas une nouveauté mais ne réjouit pas Vincent Demanet et la CBB pour autant. Celle-ci peut cependant s’expliquer par « la situation déficitaire du marché du sucre en Europe du sud, dans des pays comme l’Espagne ou l’Italie, ou encore en Europe du nord avec notamment le Danemark et l’Angleterre » selon Guy Paternoster.

Priorité à la betterave

Le message est clair pour la Raffinerie Tirlemontoise et son CEO : « la priorité, ainsi que notre activité principale, est et restera la betterave. »

Betterave

Le site de Wanze raffinera du sucre de canne cette année pendant environ deux semaines, premièrement pour une phase de test des nouvelles installations. En ce qui concerne les futures campagnes de raffinage de sucre de canne, celles-ci se feront « entre deux campagnes de betteraves et jamais au détriment d’une campagne betteravière » assure Guy Paternoster.

Pourquoi Wanze?

Le choix du groupe sucrier allemand d’investir à Wanze pour raffiner le sucre de canne trouve deux principales raisons d’être: la localisation du site et sa capacité de production.

Sucrerie

Photo ©Raffinerie Tirlemontoise

« Grâce à la connexion du site de Wanze vers et depuis le port d’Anvers via la Meuse, le transport fluvial sera privilégié. Cet accès est également intéressant par rapport aux endroits d’Europe où le sucre est déficitaire. La capacité de production du site en tonnes de sucre par jour, une des plus importantes du groupe, de même que son volume de stockage élevé justifient également le choix d’investir dans les installations du bord de Meuse. Cela permet de produire de façon efficiente » illustre le CEO de la Raffinerie Tirlemontoise.

Pour Vincent Demanet et la CBB, le choix d’investir sur le site mosan n’est pas une mauvaise chose : « il y a eu des craintes à une époque qu’on ne finisse par fermer le site de Wanze, les investissements gomment donc ces craintes. »

Match nul pour la durabilité?

La provenance de la matière première qui sera raffinée à Wanze peut quant à elle poser question au sein de nos rangs agricoles à l’heure où les obligations environnementales se multiplient. En effet, le sucre roux qui sera raffiné à Wanze pour devenir blanc sera issu de contrées exotiques telles que l’Inde, l’Afrique du Sud ou encore l’Amérique du Sud. Il ne vaut cependant pas la peine de casser du sucre sur le dos de la canne achetée par le groupe Südzucker d’après Guy Paternoster : « le sucre que nous nous procurons a été acheté avec la certification Bonsucro, garantie par des auditeurs externes. Les points d’attention de cette certification portent sur l’aspect social, comme le travail des enfants, et l’aspect environnemental. De cette façon, nous nous assurons que le sucre acheté ne soit pas produit n’importe où et n’importe comment. Il est important d’avoir un discours et des actions cohérents par rapport aux exigences appliquées aux agriculteurs européens, belges et wallons sur les standards de production et la durabilité. »  N’en reste pas moins la problématique du transport de cette matière première sur des distances continentales, qui ne pourra pas être réglée à coup de certifications…

Et les prix?

Le raffinage de sucre de canne doit-il inquiéter les betteraviers quant aux prix qui seront pratiqués sur leur sucre? Non, si l’on en croit monsieur Paternoster : « le prix du sucre en Europe est principalement basé sur le prix du sucre sur le marché mondial. Raffiner du sucre de canne n’aura donc pas d’influence sur les prix payés aux betteraviers. Selon la position de l’Europe, si l’on est importateur ou exportateur, se calcule un ajustement du prix mondial : à la hausse si l’on doit importer du sucre en Europe ou à la baisse si l’on doit exporter. »

Toujours à Wanze… où la provenance du froment pose question

Dans un communiqué cette semaine, Biowanze (également partie du groupe Südzucker) a souhaité couper les ailes d’un vilain canard colporteur de la rumeur selon laquelle une partie du froment utilisé par l’usine proviendrait de pays non-européens.

Froment

Une rumeur aussitôt démentie, car Biowanze avance utiliser 50 à 60% de blé fourrager belge, dont 98% seraient wallons, le tout étant complété par des froments fourragers français ou encore allemand. Le site mosan dément par ailleurs formellement l’utilisation de froment russe ou ukrainien.

Pour Vincent Demanet, l’activité de Biowanze est bénéfique pour les agriculteurs belges et wallons, constituant un win-win pour à la fois l’entreprise et le secteur agricole. « Si nous n’avions pas Biowanze, nous rencontrerions aussi des problèmes d’écoulement pour les céréales » conclut-il.